Se repérer dans les modèles d´évaluation. Méthodes, dispositifs, outils
Référence de l'oeuvre:
Vial, Michel, (2012), Se repérer dans les modèles de l'évaluation. Méthodes, dispositifs, outils, coll. « Pédagogies en développement », De Boeck, Bruxelles, 448 pages.
Texte intégral
1On devait déjà à Michel Vial l’excellent ouvrage herméneutique, paru en 1997, sur les textes fondateurs de modèles de l’évaluation (Les modèles de l’évaluation : textes fondateurs et commentaires, De Boeck, Bruxelles). L’auteur poursuit ici son travail de mise au jour de modèles de cette pratique sociale sur d’autres pratiques qui, loin de se réduire au scolaire, représente aujourd’hui un instrument de gouvernance (vs gestion) de communautés de ressources humaines, c’est-à-dire de relations humaines centrées sur des tâches.
2La modélisation est ainsi envisagée comme « un processus du sujet, une dimension du sujet comme processus », plaçant l’individu au centre de choix (les principes du modèle) sur lesquels sont fondés les dispositifs qui génèrent ou qui sollicitent des outils. La modélisation est une opération (dirait-on en analyse du discours) du processus de référenciation qui fait que l’évaluateur est « agi » par ses références (tissu complexe de points de vue, d’arguments d’auteurs, de cadres théoriques, de pratiques observées, voire vécues en tant qu’évaluateur ou évaluataire…). Vial montre ainsi que l'évaluation est aussi (surtout ?) une histoire de discours, intimement liée aux modalités de caractérisation opérées entre langage et pensée.
3L’approche est ici épistémologique dans le sens où elle présente trois grands modèles qui s'inscrivent dans des périodes d’influence paradigmatique fondées sur des évidences construites (la mesure, la gestion, la compréhension), centrés sur des objets d’évaluation (mesure des effets, des impacts, comparaison de bilans ; gestion de programmes ; compréhension des processus complexes, dynamiques et dialogiques). « Évaluer, c’est mesurer » a fait l’objet d’un consensus jusqu’aux années 1930 ; « évaluer, c’est gérer » a fait l’objet d’un consensus jusqu’aux années 1990, les deux modèles ont favorisé l’émergence de dispositifs et d’outils largement répandus, qui peuvent autant s’additionner en complémentarité multiréférentielle que se contredire (dispositif systémique et multiplication des outils critériels). L’évaluation des processus « située pour l’intelligibilité de ce que l’on fait », dans un double rapport de continuité et de rupture avec les précédents, constituera-t-elle un nouveau paradigme ? C’est en tout cas le sens de l’appel à articuler les paradigmes, dans un autre ouvrage récemment recensé ici même1, qui rappelle (p. 279), que Vial2 souligne qu’« il n’est pas question de déposséder l’évaluateur de cette décision : un évaluateur, c’est celui qui sait décider de ce qui est bon ou pas — qui en prend le risque », notamment celui de faire travailler la contradiction, d’assumer les différentes logiques (Vial, 2001 : 75).
4L’ouvrage est dense, mais son accès est facilité par une présentation explicative de la structure, dans laquelle les récurrences de parties dans chaque chapitre (caractérisation du modèle ; concepts-clés et notions ; implications théoriques de l’adhésion au modèle ; dispositif type du modèle ; outil exemplaire du modèle) agissent comme des repères. Ce n’est pas un manuel technique dans la mesure où il ne prescrit pas ce que seraient de bonnes pratiques, mais bien un guide de positionnement de l’évaluateur, qui encourage également à la réflexion.
Notes
1 Huver, Emmanuelle et Claude Springer, (2011), L’évaluation en langues, coll. « Langues & didactique », Didier, Paris, 351 pages.
2 2001, Se former pour évaluer, se donner une problématique et élaborer des concepts, De Boeck, Bruxelles, p. 14.
Haut de pagePour citer
Patrick Chardenet, Se repérer dans les modèles d´évaluation. Méthodes, dispositifs, outils
Le français à l'université , 17-04 | 2012
Mise en ligne le: 13 février 2013, consulté le: 15 octobre 2024