Sociophonétique du français. Genèse, questions et méthodes
Référence de l'oeuvre:
Candea, Maria et Cyril Trimaille, (2015), « Sociophonétique du français. Genèse, questions et méthodes ». Langage & Société, numéro 151, Éditions de la maison des sciences de l’homme, 183 pages.
Texte intégral
1L’ouvrage de 186 pages soumis à notre appréciation révèle une discipline émergente que présentent Maria Candea et Cyril Trimaille dans l’introduction intitulée « phonétique, sociolinguistique, sociophonétique » (p. 7-26), spécifiant ainsi son évolution, ses concepts, ses thèmes et sa place en sciences du langage.
2La sociophonétique laisse penser à une fusion entre la sociolinguistique et la phonétique quand, en réalité, tout est une affaire d’école et de courant. La sociolinguistique en a toujours fait une piste de recherche et l’a incluse très tôt dans ses approches. Rappelons par ce biais les travaux de William Labov sur la diversité de prononciation influencée par des facteurs sociaux géographiques, identitaires… Dans la même logique, nous citerons l’étude des différents parlers avec l’analyse des représentations et des stéréotypes. Quant à la phonétique, elle a opéré une démarche lente et inverse, ne trouvant dans la sociophonétique rien d’original, mais plutôt une semblable finalité, à savoir l’étude de la production et de la perception de la parole avec des instruments acoustiques, articulatoires.
3Pourtant, la sociophonétique est bien plus que la phonétique : elle révèle des analyses riches, impliquant une réflexion sur la production de la parole et sa catégorisation en soulignant l’apport de la variation sociale et du composant humain.
4Les quatre articles suivant la note introductrice de ce dossier examinent les thématiques sociophonétiques. Le premier article, « Variation sociophonétique et acquisition du langage : repères, débats, perspectives » d’Aurélie Nardy, de Jean-Pierre Chevrot et de Stéphanie Barbu (p. 22-44) démontre que l’acquisition des variables sociophonétiques chez l’enfant est dynamique et enrichie par son réseau social. Le deuxième article, « Sensibilité, insensibilité devant la variation phonétique : une étude perceptive sur le français de la région parisienne » d’Anita Beri Hansen (p. 45-66), grâce à une technique d’enquête et d’analyse socioperceptive, questionne le concept de la norme légitime vs illégitime par l’évaluation du français parisien. Le troisième article, « Questionner la signification sociale d’un indice prosodique de l’accent dit de banlieue en France » d’Iryna Lehka-Lemarchand (p. 67-86), est similaire au précédent en relatant cette fois la signification sociale de l’accent dit « de banlieue ». Le quatrième article, « Voix et transidentité : changer de voix pour changer de genre » d’Aron Arnold (p. 87-106), est une analyse du discours des personnes transgenres en posant le problème de savoir si la voix est un indice de genre.
5La sociophonétique apparue pour la première fois dans la thèse de doctorat soutenue à Londres de Deshaies-Lafontaine, en 1974 et portant sur le français parlé au Québec, a vu ses prémisses dans les analyses d’André Martinet (1945) avec ses notes sur les variables géographiques et sociobiographiques. Elle laisse des traces timides dans les recherches des années 80 et 90. Aujourd’hui, la sociophonétique est une discipline à part entière dans les sciences du langage avec les nombreuses parutions d’ouvrages, d’articles, de mémoires et de thèses qui fondent progressivement une solide littérature scientifique plus visible dans le monde anglophone. Alors existe-t-il une sociophonétique francophone ? La réponse est affirmative en à croire la riche bibliographie qui accompagne ce dossier et qui permet au lecteur une documentation supplémentaire.
Pour citer
Ndèye Maty Paye, Sociophonétique du français. Genèse, questions et méthodes
Le français à l'université , 20-04 | 2015
Mise en ligne le: 14 décembre 2015, consulté le: 05 novembre 2024