1Cette dernière livraison de « Raisons éducatives » s’ouvre d’emblée sur une question-programme : dans quelles mesures les didactiques disciplinaires pourraient-elles contribuer à la construction de la didactique comme champ scientifique et académique?

2L’ouvrage fait d’abord l’état des lieux de la recherche en France (Amade-Escot) et en Allemagne (Vollmer), regards croisés, dans deux contextes différents, du rapport entre didactiques des disciplines et didactique comme champ académique. Il s’organise ensuite, à travers 10 contributions, autour de 2 axes majeurs : l’un centré sur les contenus d’enseignement et les savoirs de référence, l’autre abordant des questions relevant des concepts et des méthodes de recherche.

3Le premier axe s’articule autour d’un point commun particulièrement important aux diverses didactiques disciplinaires : l’étude des phénomènes de transposition didactique. Il s’agit d’un processus multidéterminé par autant de niveaux que d’acteurs, à l’intérieur comme à l’extérieur du système didactique. Ainsi, pour les enseignements artistiques, les auteurs (Mili et al.) mettent en place un croisement de recherches issues de quatre domaines (danse, théâtre, arts visuels et musique), autour d’une thématique fédératrice de la corporéité. En ce qui concerne l’éducation physique, les deux recherches présentées (Lenzen et al.), portant sur les sports collectifs, affichent l’ambition de contribuer à la construction de références qui font sens pour les enseignants et qui répondent aux nouvelles demandes sociales. Par ailleurs, l’urgence de revoir et de redéfinir les contenus de la géographie (Jenni et al.) au regard de l’évolution des savoirs de référence et des finalités sociales, politiques et éducatives, concerne également l’histoire (Heimberg et al.) en vue de la soustraire à une quelconque mainmise de la doxa. Enfin, partant d’une conception émergente fondée sur le rapprochement de la théorie littéraire et des catégories analytiques de la didactique de la littérature, les auteurs de cette étude (David et Graber) examinent en amont les représentations et les pratiques actuelles en matière d’interprétation des œuvres littéraires.

4Les contributions du second axe traversent autant d’objets que de didactiques disciplinaires. Leur transversalité instaure une espèce de dialogisme interdidactique et interdisciplinaire. Autant d’opportunités en vue d’appréhender les éléments communs à la recherche didactique. En effet, la tâche (Muller et al.) de même que le travail enseignant (Clivaz et al.) impliquent les acteurs didactiques (enseignants/enseignés), l’accent portant ainsi sur l’activité des uns et des autres dans le processus didactique. L’argumentation (Weiss et al.) et la justification (Sales Cordeiro et al.) illustrent bien ce passage d’un objet d’enseignement à une démarche heuristique. Ce qui contribue à une meilleure compréhension à la fois de la médiation enseignante et du rapport des élèves aux savoirs à travers la négociation didactique. Quant à l’objet enseigné (Ronveaux et al.), il renvoie à une catégorie générique, se déclinant selon les spécificités de chaque discipline.

5Ce volume, fruit de collaboration de plusieurs équipes, présente un large panorama de réflexions et d’études traversant les frontières disciplinaires. Il représente de ce fait une véritable avancée dans la construction d’un champ disciplinaire didactique. Autant de pistes et de chantiers possibles pour les chercheurs.