1Cet ouvrage propose les textes de 13 écrivains réunis en colloque à Montréal, en 2008, un an après la parution du Manifeste pour une littérature-monde. On y trouve « des éléments de réponse, mais également, de nouvelles interrogations ». La francophonie, récusée par le Manifeste, est « un espace encore à créer » : la France devrait en faire partie au même titre que les autres littératures en français et non plus en constituer le noyau central. Si on veut atteindre ce but, la langue française doit rester la langue de la culture, et le rayonnement mondial de sa littérature ne doit plus dépendre de l’économie. « La francophonie est un organisme politique international dont les buts explicites énoncés dans sa charte sont la promotion de la langue française dans le monde et la défense des diversités culturelles. » Ces diversités sont essentielles, comme l’explique Vénus Khoury-Ghata : « Mon nomadisme entre deux langues a forgé une langue mitoyenne, une langue autre, pratiquée par d’autres écrivains souvent francophones. » Encore faudrait-il que cette littérature en « langue autre » ne fût plus dite « marginale ».

2Le recueil met aussi l’accent sur la lecture et sur l’impact de la rencontre avec les textes en français : « L’activité de traduction qui anime tout à coup la langue a le pouvoir de transformer un enfant en écrivain », mais le désapproprie aussi de sa langue locale. Ce malaise peut se résoudre dans « le présent continuel de la lecture », selon l’expression de Joël Des Rosiers, la littérature devenant alors le seul moyen de défendre la langue française menacée et de rendre compte de la violence du monde contemporain, tout en se libérant de la toute-puissance de l’Histoire, y compris de la coloniale. Loin des clichés, ce livre conduit réellement à la réflexion.