Le français à luniversité

Baudelaire et la révolution culturelle chinoise

Marina Ondo

Référence de l'oeuvre:

Yang, Yuping, (2013), Baudelaire et la révolution culturelle chinoise, Presses Sorbonne nouvelle, Paris, 334 pages.

Texte intégral

1Cet ouvrage arrive à point nommé et vient enrichir le nombre de contributions à l’étude de Baudelaire ainsi que son rapport avec les littératures étrangères. Son objectif est de mettre à la disposition des chercheurs, aussi bien sinophones que francophones, des documents de première main et un certain nombre de textes choisis, encore mal connus, afin de les restituer dans leur contexte par des transcriptions en pinyin des caractères chinois. Le lecteur sera bien avisé de ne pas s’arrêter à la relation ou à l’influence de Baudelaire sur la poésie chinoise moderne au cours de la Révolution culturelle en Chine (1966-1976), puisque des salons littéraires souterrains à travers l’action des « Gardes Rouges », « des Clubs X », ont ravivé l’intérêt de « Jeunes instruits » pour la lecture des poètes français, faisant ainsi éclore, par l’entremise des échanges (Orient-Occident), une poésie contemporaine chinoise et une nouvelle lecture de la poésie baudelairienne. Au-delà de ce champ de recherche encore inexploré, on note l’apport inédit de l’auteur avec ses traductions personnelles des textes non traduits jusque-là, et surtout le regard neuf que les traducteurs de Beijing et de Shanghai portent sur Les fleurs du mal.

2À Beijing, des traducteurs tels que Chen Jingrong (9 poèmes traduits), Shen Baoji (traduction de quelques poèmes de Baudelaire en plus de ceux d’Aragon), Dai Wangshu (24 poèmes traduits) s’efforcent d’interpréter la nature et la profondeur de l’être. Parmi les poètes contemporains chinois passionnés de Baudelaire, Si Zhi fait écho à l’éloge de la ville moderne, en particulier celle de Paris, Mang Ke s’oriente vers une vision picturale de la poésie, Gen Zi propose une poésie où les suggestions érotiques s’allient à la description d’une société décadente; chez Duo Duo, la poésie est poussée dans sa dimension la plus satanique par le souffle blasphématoire qui l’étreint sans cesse. Par ailleurs, Yang Yuping consacre tout un chapitre à Bei Dao, car ce poète majeur a su établir des correspondances et des images allégoriques frappantes autour de la philosophie de la vie et des mystères du monde. À Shanghai, des traducteurs comme Zhu Yulin apprivoisent la poésie de Baudelaire avec une singularité qui déconstruit tout un pan du langage poétique occidental par la touche orientale. Toutes ces traductions ont favorisé la construction d’une poésie contemporaine qui se détache, peu à peu, de la politique et met en lumière la réalité des échanges littéraires sino-français avant 1949. Ce qui est captivant, c’est le fait que les modifications effectuées lors des différentes traductions confèrent à la poésie baudelairienne un aspect plus exotique et symbolique.

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Pour citer

Marina Ondo, Baudelaire et la révolution culturelle chinoise
Le français à l'université , 18-04 | 2013
Mise en ligne le: 19 décembre 2013, consulté le: 18 avril 2024

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Auteur

Marina Ondo

Université Jean Moulin ― Lyon 3 (France)

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